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Analyse

La droite, favorite des élections parlementaires italiennes du 4 mars prochain

Élections en Europe

Corinne Deloy

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5 février 2018
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Corinne Deloy

Chargée d'études au CERI (Sciences Po Paris), responsable de l'Observatoire des élections en Europe à la Fondation Robert Schuman

La droite, favorite des élections parlementaires italiennes du 4 mars prochain

PDF | 269 koEn français

Le 28 décembre dernier, le président de la République italienne, Sergio Mattarella, a dissout le parlement (Assemblée et Sénat) et convoqué des élections parlementaires le 4 mars prochain. Selon la Constitution, celles-ci doivent en effet être organisées dans les 45 à 70 jours après la dissolution du parlement.

Trois camps s'affrontent pour les élections parlementaires. D'un côté, la droite, représentée par Forza Italia (FI), le parti de l'ancien président du Conseil (1994-1995, 2001-2006 et 2008-2011) Silvio Berlusconi, la Ligue du Nord (LN) dirigée par Matteo Salvini, et Frères d'Italie (FdI) de Giorgia Meloni, de l'autre, la gauche, dont le principal parti est le Parti démocrate (PD) de Matteo Renzi, auquel appartient l'actuel chef du gouvernement Paolo Gentiloni. Le troisième camp est celui du Mouvement 5 étoiles (M5S) fondé par Beppe Grillo, parti populiste inclassable qui rejette tout accord de coalition avec les autres partis et dirigé actuellement par Luigi di Maio.

Selon la dernière enquête d'opinion réalisée par l'institut Tecne et publiée à la fin du mois de janvier, le Mouvement 5 étoiles arriverait en tête des élections parlementaires du 4 mars avec 27,8% des suffrages. Il devancerait le Parti démocrate, qui recueillerait 22,2% des voix, Forza Italia, 18,3%, la Ligue 12,8% et Frères d'Italie 5,1%. Ensemble, ces 3 partis, situés à droite sur l'échiquier politique, recueilleraient 36,2% des suffrages et n'atteindraient donc pas la majorité absolue (avec le nouveau mode de scrutin, celle-ci peut être atteinte avec 40% des voix). Certains observateurs mettent en avant le fait que Forza Italia pourrait s'allier avec le Parti démocrate à l'issue du scrutin, une possibilité que Silvio Berlusconi comme Matteo Renzi rejettent actuellement...

Une difficile sortie de crise

A l'issue des précédentes élections parlementaires des 24 et 25 février 2013, aucune des deux principales coalitions, celle de gauche dirigée par Pier Luigi Bersani et celle de droite conduite par Silvio Berlusconi, n'avait obtenu la majorité absolue des sièges à la Chambre des députés et au Sénat, ce qui constituait un problème réel en raison du bicaméralisme parfait en vigueur à l'époque qui accordait des pouvoirs similaires aux deux chambres du parlement et qui obligeait donc l'exécutif à posséder la majorité dans chacune des assemblées pour être en mesure de gouverner. La percée électorale du parti populiste du Mouvement 5 étoiles avait également bouleversé l'échiquier politique italien, jusqu'alors largement dominé par le bipartisme.

Quelques jours après le scrutin, le 20 avril, le président de la République sortant, Giorgio Napolitano, avait été réélu à la tête du pays par les grands électeurs, incapables de lui trouver un successeur. Quelques jours plus tard, le 28 avril, le président de la République nommait Enrico Letta (PD) à la présidence du Conseil à la tête d'un gouvernement d'union nationale. Enrico Letta a été renversé par une motion de censure interne au Parti démocrate et remplacé à son poste par Matteo Renzi le 22 février 2014.

Le nouveau président du Conseil a fait adopter plusieurs réformes importantes, dont celle du marché du travail appelée Jobs Act, contestée par une partie de la gauche, ou celle permettant l'union de deux personnes du même sexe, contestée par une partie de la droite. De même, il a travaillé à faire voter une nouvelle loi électorale afin de mettre un terme au bicamérisme parfait. Le 4 décembre 2016, les Italiens ont cependant rejeté à une large majorité (59,11%) le projet de réforme de la Constitution que leur a proposé Matteo Renzi et qui visait à renforcer la stabilité du système politique italien et à faciliter la prise de décision. Le Mouvement 5 étoiles, la Ligue du Nord, Forza Italia, les partis d'extrême gauche et une partie du Parti démocrate emmenée par l'ancien président du Conseil (1998-2000) Massimo d'Alema et l'ancien ministre Pier Luigi Bersani, avaient appelé à voter "non". Les deux hommes ont quitté le Parti démocrate et ont fondé le 25 février suivant "Article 1er-Mouvement démocrate et progressiste" (MDP).

A l'issue du référendum, le président du Conseil, qui avait lié son sort au résultat de la consultation populaire, a démissionné de ses fonctions. Le 12 décembre, Matteo Renzi était remplacé par son ministre des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni (PD). Sept partis composent la coalition gouvernementale sortante : le Parti démocrate, les Centristes pour l'Europe (CpE) de Pier Ferdinando Cassini, Démocratie solidaire (Demo.S) de Lorenzo Dellai, le Centre démocratique (CD) de Bruno Tabacci et le Nouveau centre-droit (NCD) d'Angelino Alfano. Ce dernier a été créé le 15 novembre 2013 par un groupe de dissidents du Parti du peuple pour la liberté (PdL) opposés à la transformation de leur parti devenu Forza Italia.

Le 3 novembre 2017 a été promulguée une nouvelle loi électorale, appelée Rosatellum bis du nom de l'homme qui a porté cette réforme, Ettore Rosato, dirigeant du groupe du Parti démocrate à la Chambre des députés.

La Chambre des députés (Camera dei Deputati) compte 630 membres élus pour 5 ans : 232 députés (soit 37% du total) sont désignés au scrutin uninominal, 386 (61%) sont choisis au scrutin proportionnel et 12 (2%) sont élus par les Italiens de l'étranger.

Le Sénat (Senato della Repubblica) compte 315 membres élus pour 5 ans de la même façon que les députés : 116 sont choisis au scrutin uninominal, 193 sont désignés au niveau régional au scrutin proportionnel et 6 sont élus par les Italiens de l'étranger. On compte également quelques sénateurs à vie, anciens présidents de la République et d'autres personnes nommées par le chef de l'Etat en exercice.

L'attribution des sièges s'effectue selon la méthode d'Hondt. Un parti politique doit obligatoirement recueillir au moins 3% des suffrages pour obtenir des élus au scrutin proportionnel (10% des voix pour une coalition).

Le président du Conseil Paolo Gentiloni a choisi d'engager son gouvernement et demandant le vote d'une motion de confiance pour faire adopter la nouvelle loi électorale qui a été approuvée le 12 octobre par la Chambre des députés par 375 votes contre 215 et le 26 octobre par le Sénat par 214 voix contre 61.

Cette nouvelle loi, davantage proportionnelle que majoritaire, ne garantit en rien la constitution d'une majorité post-électorale stable. "En mélangeant systèmes majoritaire et proportionnel, la loi favorise les partis capables de former des coalitions, ce qui est le cas du Parti démocrate et des deux principaux partis de l'opposition de droite, la Ligue du Nord et Forza Italia. Le M5S, qui a toujours refusé toute alliance, est sans doute le parti le plus pénalisé par le texte" analyse Franco Pavoncelo, professeur de sciences politiques à l'université américaine de Rome. Beppe Grillo a d'ailleurs condamné cette nouvelle loi électorale (qu'il a baptisée Fascistellum) dans les termes les plus vifs, qualifiant le texte d'"anti-démocratique" et d'"anticonstitutionnel" et affirmant qu'il a pour "seul but d'écarter du pouvoir le premier parti d'Italie". "L'objectif est de nous anéantir. C'est une violation des lois démocratiques, un coup mortel à la démocratie" a souligné Luigi Di Maio, le candidat du M5S au poste de président du Conseil.

"L'Italie demeure divisée en deux blocs, l'un de droite et l'autre de gauche, qui ne parviennent pas à avoir une majorité claire forte et stable. Le 4 mars, on risque de voir se répéter le scénario que nous avons connu ces 25 dernières années, marquées par une alternance entre gouvernements populistes et gouvernements techniques" a déclaré Raffaele Landani, professeur de science politique à l'université de Bologne.

Silvio Berlusconi, le retour ?

Alors que lors de son arrivée au pouvoir, Matteo Renzi avait promis un rottamazione (une mise au rebut, qui devait "envoyer les vieux caciques de la politique à la casse"), la figure montante de la politique italienne à la veille du scrutin est bien celle de Silvio Berlusconi, 81 ans, à la reconquête du pouvoir.

Le Cavaliere n'est pas autorisé à briguer un quelconque mandat en raison de sa condamnation en 2013 à une peine d'inéligibilité pour fraude fiscale au bénéfice de son groupe Mediaset, condamnation dont il dénonce l'inconstitutionnalité. La loi du 6 novembre 2012, dite loi Severino, rend en effet inéligible toute personne condamnée à une peine supérieure à 2 ans de prison pour des délits comme la fraude ou la corruption. Silvio Berlusconi a fait appel de ce jugement devant la Cour européenne des droits de l'Homme. L'ancien chef du gouvernement italien est également interdit d'exercer au sein de la fonction publique jusqu'en 2019.

Son inéligibilité n'empêche cependant pas le Cavaliere de faire figurer son nom à côté du logo de Forza Italia sur les bulletins de vote, ce qui, selon lui, devrait attirer 2 millions de suffrages supplémentaires en faveur de son parti. Berlusconi président est également le slogan choisi par Forza Italia. "Cette fois, il peut jouer le rôle de faiseur de roi ou être l'un des faiseurs de roi mais il ne peut pas être roi" a indiqué Pierangelo Isernia, professeur de science politique de l'université de Sienne,. "Il est très improbable que Silvio Berlusconi devienne à 81 ans une 4e fois chef de gouvernement est ainsi très improbable mais je ne peux pas dire que c'est impossible, car avec Silvio Berlusconi, rien n'est impossible" a souligné Giovanni Orsina, politologue et professeur d'histoire de l'université Luiss de Rome.

Allié aux Frères d'Italie, Forza Italia est arrivé en tête des élections régionales qui se sont déroulées le 5 novembre en Sicile. "Avec cette coalition, nous pouvons gagner n'importe où. Nous avons démontré qu'unis, nous sommes les seuls à pouvoir faire rempart au M5S, qui représente le vrai danger" s'est félicité Silvio Berlusconi à l'issue de ce scrutin qui constituait une sorte de test avant les élections parlementaires du 4 mars. Nello Musumeci a été élu président de Sicile. Le candidat de l'union des droites l'a emporté avec 39,85% des voix devançant Giancarlo Cancelleri (M5S) qui obtenu 34,65%. "Je suis très satisfait du résultat des élections siciliennes (...), il s'agit d'un grand succès des modérés : nous sommes la seule solution alternative au M5S de Beppe Grillo" a déclaré Silvio Berlusconi le 7 novembre au quotidien Le Corriere della Sera.

L'alliance des partis de droite s'est également imposée aux dernières élections municipales partielles (1 004 communes concernées sur un total d'environ 8 000 dans toute la péninsule) qui se sont déroulé les 11 et 25 juin derniers. Les forces de gauche ont perdu les villes de Gênes, Palerme, L'Aquila et Catanzaro.

Dans les années 1990, le Cavaliere se présentait comme le seul rempart contre le communisme et les "juges rouges" d'une magistrature italienne qui était, selon lui, sous l'emprise de l'extrême gauche. Une vingtaine d'années plus tard, il se pose à la fois en rempart contre le populisme du M5S et contre le chaos qui serait consécutif à son arrivée au pouvoir mais également comme le seul capable de rassembler la droite italienne autour de Forza Italia et, si nécessaire, d'unir la droite et la gauche au sein d'un gouvernement.

"Encore une fois, Silvio Berlusconi se révèle être le seul capable d'unifier la droite. Il a recréé la coalition avec les postfascistes et les séparatistes du Nord, qui défendent maintenant l'identité nationale contre les immigrants plutôt que l'autonomie des régions riches. Sans Forza Italia, ces deux mouvements sont dominés par les extrémistes. L'Italie depuis la Seconde Guerre mondiale a presque toujours été gouvernée par un parti-pivot de centre droit, tout d'abord la Démocratie chrétienne, puis les partis de Berlusconi" analyse Franco Pavoncello, politologue de l'université John Cabot de Rome.

Silvio Berlusconi n'a quasiment pas changé une ligne au programme qui a toujours été le sien, il promet toujours une plus grande libéralisation de l'économie, de massives baisses d'impôts et une réforme de la justice. "Nous aurons naturellement un grand programme politique pour changer l'Italie, qui va consister en 3 points principaux : une profonde réforme fiscale de réduction des impôts, le véritable arrêt de l'immigration clandestine et un rapport différent avec l'Europe" a déclaré le Cavaliere.

Les forces de droite se sont accordées le 18 janvier dernier sur une plateforme qui prévoit une baisse des impôts (abandon de l'impôt foncier sur la résidence principale et de la vignette automobile sur le premier véhicule, forte diminution des droits de succession), un contrôle plus étroit de l'immigration, l'annulation de toute hausse de l'âge du départ à la retraite et l'établissement d'une flat tax, taxe à taux unique pour la TVA, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, que Silvio Berlusconi aimerait fixer à un taux (appelé à décroître) situé entre 20% et 25% (après exemption des 12 000 premiers € pour respecter le principe de progressivité inscrit dans la Constitution) et que la Ligue du Nord souhaiterait établir à 15%. Les partis de droite estiment que la baisse des recettes fiscales sera compensée par la hausse de la consommation des ménages qui disposeront de davantage de liquidités et par la lutte contre la fraude fiscale. La Ligue du Nord affirme qu'elle récupèrera 40 milliards € de cette façon. L'ancien président du Conseil promet également d'offrir un revenu de 1 000 € mensuels aux 5 millions de ménages les plus pauvres et de doubler le montant du minimum retraite qui passerait à 1 000 € par mois (sur 13 mois). La loi Fornero (du nom de la ministre du Travail et des Politiques sociales de l'époque Elsa Fornero) de 2011, qui prévoit une hausse échelonnée de l'âge du départ en retraite, serait abandonnée. Enfin, le Cavaliere veut lancer un plan Marshall pour l'Afrique afin de réduire l'immigration illégale en Italie.

La Ligue du Nord, qui a modifié son nom en Ligue (Lega), est désormais présente sur l'ensemble du territoire italien. Son dirigeant Matteo Salvini a même créé une association Noi con Salvini (NcS) (Avec Salvini) pour affirmer la présence de son parti dans les régions centrales et méridionales de la péninsule.

Le parti populiste a fait des questions de sécurité le premier enjeu des élections. "Nous voulons chasser les clandestins qui sont trop nombreux, fermer les camps de Roms et défendre les frontières" a déclaré Matteo Salvini. 119 368 personnes ont débarqué sur les côtes italiennes en 2017. S'il qualifie l'euro "d'expérience ratée" et veut que l'Italie retrouve sa souveraineté monétaire, Silvio Berlusconi a promis que l'Italie respecterait les critères budgétaires de l'Union européenne en cas de victoire de son parti.

A la fin du mois de novembre dernier, Silvio Berlusconi avait proposé le nom du général des carabiniers Leonardo Gallitelli comme chef du futur gouvernement de droite en cas de victoire le 4 mars. Agé de 69 ans, le militaire a dirigé entre 2009 et 2015 le corps des Carabinieri, une force de police qui dépend à la fois des ministères de la Défense et de l'Intérieur. Il dirige désormais le Bureau antidopage italien. Le 25 janvier, le Cavaliere a fait l'éloge d'Antonio Tajani, actuel président du Parlement européen, qui, selon lui, serait "un choix merveilleux" pour le poste de président du Conseil ...italien.

S'il ne remporte pas les élections, Silvio Berlusconi a promis de se retirer de la vie politique. "Cela voudra dire que les Italiens sont incapables de juger les gens qui ont fait des choses bien dans leur vie et ceux qui n'ont jamais rien fait" a-t-il indiqué.

La gauche à la peine

L'ancien président du Conseil Matteo Renzi a été réélu avec plus de 69% des suffrages à la tête du Parti démocrate le 30 avril 2017 ; environ 2 millions d'électeurs ont participé à ce scrutin. Si cette victoire lui offre une indéniable légitimité, elle n'empêche pas le nombre croissant de défections au sein du parti. Ainsi, l'ancien maire de Milan Giuliano Pisapia vient de quitter les rangs démocrates après l'échec de la loi sur le jus soli (devant accorder automatiquement la nationalité aux enfants d'immigrés résidant en Italie depuis plus de 5 ans). A la fin du mois d'octobre dernier après l'adoption de la nouvelle loi électorale, le président du Sénat, Pietro Grasso, a choisi de quitter le Parti démocrate pour fonder Libres et égaux (Liberi e Uguali, LeU), parti de gauche opposé à Matteo Renzi. LeU promet une augmentation des dépenses dans le secteur de l'éducation, une accélération de la transition énergétique et l'annulation de la réforme de la loi sur le travail (Jobs act) adoptée entre 2014 et 2015 par le gouvernement de Matteo Renzi. Si celle-ci a très bien fonctionné au cours des premiers mois, les entreprises étant fiscalement incitées à embaucher de nouveaux salariés, elle a fini par marquer le pas. Elle a néanmoins créé 655 000 nouveaux emplois. LeU a accusé le Jobs act de précariser les contrats de travail. Le parti dénonce également l'union du Parti démocrate avec des forces de droite au sein du gouvernement. Matteo Renzi accuse ses anciens partenaires de "n'avoir pas d'autre stratégie que de le faire perdre".

Le dirigeant démocrate, qui est candidat à un poste de sénateur, a promis de réduire les impôts et d'augmenter le déficit budgétaire en cas de victoire le 4 mars. "Nous porterons à nouveau le déficit à 2,90% du PIB, en baissant les impôts de 30 à 50 milliards €" a-t-il déclaré. Le programme du Parti démocrate promet de créer un salaire minimum de 10 €/heure (15% des travailleurs seraient concernés), de lutter contre le chômage, d'investir davantage et mieux dans les secteurs innovants et de gérer plus efficacement les arrivées de réfugiés et de migrants. Matteo Renzi veut "défendre l'Italie du populisme des partisans du M5S et de l'extrémisme de Matteo Salvini et de Silvio Berlusconi". "Si quelqu'un pense que l'incompétence du M5S et les provocations de la Lega sont plus utiles pour l'Italie, nous respecterons le résultat mais je vois une autre Italie, bien vivante" aime-t-il à souligner.

Depuis 2013, Matteo Renzi a perdu son image de modernisateur. En outre, alors qu'il a semblé accepter le verdict des urnes et qu'il a démissionné à l'issue du référendum du 4 décembre 2016, il s'est montré finalement très impatient de revenir au cœur du jeu politique. "Matteo Renzi a été un élément de nouveauté et de fraîcheur et il a été un bon président du Conseil mais il s'est trompé sur le référendum et surtout il s'est trompé après, en n'en tirant pas les conséquences. Il aurait dû en profiter pour faire une pause de 3 ans avant de revenir" a déclaré le président historique du groupe L'Espresso Carlo De Benedetti au quotidien Le Corriere della Sera.

La liste du Parti démocrate est conduite par le ministre sortant de l'Economie et des Finances Pier Carlo Padoan, lui-même candidat à un poste de député à Sienne.

Faut-il craindre le Mouvement 5 étoiles ?

Le Mouvement 5 étoiles est un parti eurosceptique, écologiste, qui rejette les élites, souhaite fermer les routes de l'Italie aux migrants, veut établir un revenu de citoyenneté à hauteur de 780 €, défend les services publics et la démocratie représentative et le contrôle des représentants par les représentés. Le parti refuse de se positionner sur l'échiquier politique. Son ancien dirigeant Beppe Grillo, inéligible en raison de sa condamnation en 1985 pour homicide involontaire après un accident de la route, a pris ses distances avec le parti.

Le M5S a nettement atténué son discours anti-euro mais fait d'un référendum sur la sortie de l'euro l'un de ses chevaux de bataille, une idée quasiment abandonnée. "Je pense que ce n'est plus le moment pour l'Italie de quitter l'euro" a déclaré Luigi di Maio au début du mois de janvier pour rassurer d'une part l'opinion publique italienne, pas forcément favorable à cette idée et plus préoccupée par l'arrivée des migrants sur le sol italien que par une crise de la devise européenne, mais aussi d'autre part les partenaires européens de Rome. Le M5S veut s'affranchir des règles édictées par Bruxelles et, par exemple, prône le dépassement de 3% de déficit public pour relancer l'économie. Il affirme vouloir réduire la dette de l'Etat à 90% du PIB (elle s'élève à 133%) et l'impôt sur le revenu, augmenter les dépenses à destination des familles et embaucher des milliers de personnes dans le secteur public.

Luigi di Maio, dirigeant du M5S, désigné candidat à la présidence du Conseil par 31 000 voix sur 37 000 à l'élection primaire du parti, a indiqué que le M5S devrait être chargé de former le gouvernement s'il arrive en tête des élections. Le leader populiste a affirmé que son parti était prêt à faire alliance avec les partis qui le désiraient mais qu'il pouvait également envisager de s'appuyer sur des majorités ponctuelles au parlement. "Si nous ne pouvons gouverner seuls comme nous le souhaitons, nous lancerons un appel public aux autres forces politiques qui seront représentées au parlement. Nous présenterons notre équipe et notre programme et nous gouvernerons avec tous ceux (à l'exception de Matteo Renzi et de Silvio Berlusconi) qui sont d'accord avec nous" a-t-il déclaré. Il semble cependant inconcevable que le président de la République Sergio Mattarella puisse décider de nommer le dirigeant du M5S à la présidence du Conseil à l'issue des élections du 4 mars. Tout prétendant au poste de chef du gouvernement devra être un rassembleur capable de former une majorité sur son nom.

La solution Paolo Gentiloni

A un mois du scrutin, le jeu reste ouvert. Dans le cas où ni la droite ni la gauche, ni le M5S ne parviendrait à avoir une majorité, de nombreux observateurs politiques pensent que le président du Conseil sortant, Paolo Gentiloni, pourrait constituer un compromis idéal. Après un peu plus d'un an à la tête du gouvernement, l'homme, qui est candidat à un poste de député à Rome, est le dirigeant politique le plus populaire du pays et le "Premier ministrable" préféré des Italiens (45% d'opinions favorables).

Il s'est réjoui du bilan de son gouvernement. "La législature a été tourmentée mais fructueuse. L'Italie s'est remise en marche après la crise la plus grave de l'après-guerre. Je laisse une Italie plus solide et solidaire" a-t-il affirmé. Le PIB a enregistré une progression au cours des 13 derniers trimestres (1,8% en 2017) et les analystes économiques anticipent une croissance de 1,5% pour 2018. Le déficit est passé sous la barre de 2% du PIB et le taux de chômage a baissé et s'établit à 10,8% ; le chômage des jeunes a également reculé mais reste élevé (32,2%). De même, la dette publique de l'Italie demeure l'une des plus hautes de la zone euro (133% du PIB).

Le système politique italien

Les partis politiques italiens non représentés au parlement doivent impérativement recueillir entre 1 500 et 4 000 signatures d'électeurs résidant dans une circonscription (300 au Val d'Aoste) pour pouvoir se présenter aux élections parlementaires dans cette même circonscription. Les candidats à la fonction de député doivent être âgés d'au moins 25 ans et les prétendants à la Chambre haute doivent avoir au moins 40 ans. Par ailleurs si les Italiens de 18 ans et plus peuvent désigner leurs députés, seuls ceux âgés de 25 ans et plus sont autorisés à élire les membres du Sénat.

L'Italie possède un grand nombre de partis politiques. Ils sont répartis en 11 groupes actuellement représentés à la Chambre des députés :

– Le Parti démocrate (Partito democratico, PD) du président du Conseil sortant Paolo Gentiloni, fondé par Walter Veltroni en avril 2007 à partir des Démocrates de gauche (DS) de Piero Fassino, et de La Margherita de Francesco Rutelli. Dirigé par l'ancien président du Conseil (2014-2016) Matteo Renzi, il compte 281 députés ;

– Le Mouvement 5 étoiles (Movimento 5 Stelle, M5S), parti populiste fondé le 4 octobre 2009 par Beppe Grillo et Gianroberto Casaleggio et conduit par Luigi di Maio, possède 88 élus;

– Le Parti du peuple pour la liberté (Il Popolo della Libertà, PdL), créé le 12 décembre 2007 par l'ancien président du Conseil (1994-1995, 2001-2006 et 2008-2011) Silvio Berlusconi. Dissout à l'été 2013 par son dirigeant qui a reconstitué Forza Italia (FI), il compte 56 députés;

– Article 1er Mouvement démocrate et progressiste (Articolo 1 Movimento Democratico e Progressista, MDP), né d'une scission avec le parti démocrate en février 2017 conduit par Roberto Speranza et qui inclut Massimo D'Alema et Pier Luigi Bersani, et qui a rejoint le 3 décembre la coalition Liberi e Uguali pour le scrutin du 4 mars, possède 42 élus;

– L'alternative populaire (Alternativa Popolare (AP), Centristes pour l'Europe (Centristi per l'Europa (CpE), qui regroupe les partis d'Angelino Alfano, ministre sortant des Affaires étrangères et de Pier Ferdinando Cassini, possède 23 élus;

– La Ligue du Nord (Lega, LN), parti populiste, antieuropéen et xénophobe créé en 1989 par Umberto Bossi et dirigé par Matteo Salvini, possède 22 élus

- Gauche italienne (Sinistra Italiana SI), parti de gauche né en février 2017 de la fusion avec Gauche, écologie et liberté (Sinistra Ecologia Libertà, SEL), possède 17 élus ;

– Démocratie solidaire - Centre démocrate (Democrazia Solidale - Centro Democratico (DeS-CD), compte 12 députés ;

– Frères d'Italie (FdI), parti fondé le 21 décembre 2012 et issu d'une scission du Parti du peuple de la liberté et dirigé par Giorgia Meloni, compte12 députés ;

– Choix civique pour l'Italie (Scelta Civica per l'Italia, SC), parti centriste né le 4 janvier 2013 par l'ancien président du Conseil (2011-2013) Mario Monti qui l'a quitté et emmené par Mariano Rabino, possède 16 députés ;

Il y a 61 députés affiliés au groupe mixte (Misto) dont

14 députés Civici e Innovatori (CI) - Energie per l'Italia, né de la scission d'avec le choix civique pour l'Italie (SC) ;

- 10 députés de Direzione Italia (DI), conservateurs et réformistes ;

- 6 députés de l'Union du centre (UdC);

- 6 députés des minorités linguistiques dont 5 du Parti populaire du Tyrol du Sud (Partito Popolare Sudtirolese - Südtiroler Volkspartei, SVP), parti démocrate-chrétien représentant les Italiens de langue allemande de la province autonome de Bolzano dirigé par Arno Kompatscher et 1 d'Autonomie, liberté, démocratie du Val d'Aoste Autonomia Libertà Partecipazione Ecologia, ALPE) ;

- 5 députés qui ont quitté le M5S (Alternativa Libera et Tutti insieme per l'Italia) ;

- 3 députés du parti socialiste italien (PSI) ;

- et 17 non-inscrits

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